Maroc : L’étendu et les fondements du devoir de conseil du banquier

par Zakariaa 4 Mai 2009, 13:12 Droit des affaires au Maroc

Il y a lieu de faire la distinction entre l’information et le conseil. L’information, est une donnée objective, qui ne comprend aucune incitation, alors que le conseil comprend une recommandation.

L'activité de conseil dépasse largement celle de l'information. Celle-ci implique une intervention plus active, une orientation voire un dirigisme dans ce qu'il convient de faire ou de ne pas faire. Si le banquier a l'obligation d'informer son client, il n'a pas, de manière générale, à le conseiller. Le banquier n'a pas, en principe, de devoir de conseil général. Il n'a, ni en droit, ni en vertu de sa déontologie professionnelle, l'obligation de jouer le rôle de directeur de conscience économique et financière des clients qui sollicitent un service bancaire (ex : placement d’argent en bourse), à moins qu'il n'ait accepté de jouer ce rôle de conseil dans des cas spécifiques.

La nature même des activités du banquier, qui n'est en rien assimilable à un notaire ou à un conseiller juridique, n'implique nullement l'existence d'une obligation de conseil. Hors contrat, le banquier doit seulement fournir à sa clientèle des informations techniques complètes et précises.

Certaines jurisprudences, notamment françaises, appuient cette tendance et confirment que le banquier n'a pas de devoir général de conseil envers ses clients. Néanmoins, quelques décisions ont toutefois émis ou retenu l'idée contraire. Plusieurs d'entre elles opèrent malheureusement souvent la confusion et parlent d'obligation de conseil, alors qu'il s'agit, en l'espèce, d'une obligation d'information ou de renseignement.

Cela laisse supposer que le devoir de conseil est une obligation contractuelle. C’est à dire une obligation qui a pour source le contrat passé entre le banquier et son client.

Cependant, la pratique montre que les banques interrogent leurs clientèles sur leurs habitudes, projets, avenir,…etc. Le but, est de mieux les connaître, évaluer leurs besoins et éventuellement les informer et les conseiller. Aussi, les clients lorsqu’ils viennent voir leurs banquiers, ils le font, en général, quand ils ont un projet déterminé (acheter une maison, faire fructifier des économies…etc.). Par contre, ils n’ont peut être pas d’idée précise quant ils viennent les voir. C’est donc aux banquiers qu’il revient d’analyser les besoins de ces derniers puis de leur indiquer les services adaptés.

Cela nous incite à se poser la question si le banquier n’est pas tenu à un devoir de conseil hors contrat ?

En effet, nous savons que le devoir de conseil est plus étendu que celui d’information. Son domaine d’application est aussi vaste que celui de l’activité bancaire elle-même. Il ne faut pas s’en étonner dans la mesure où les banquiers ont tendance à diversifier leurs activités. Ce devoir comporte deux prestations, l'une d'ordre intellectuel et surtout professionnel, qui s'analyse en une obligation de moyen, et l'autre purement matérielle, qui s'analyse en une obligation de résultat.

Si la dernière doit figurer dans le cadre d’un contrat pour engager la responsabilité contractuelle du banquier, l’obligation de moyens engage le banquier en tant que professionnel en vertu duquel il doit déployer ses meilleurs efforts pour atteindre l'objectif visé, sans que sa responsabilité puisse être engagée du seul fait qu'il n'a pas atteint un résultat.

 De ce qui précède, il parait que ne nous pouvons renfermer le devoir de conseil dans un cadre purement contractuel, puisque ce devoir est aussi large que l’activité du banquier elle-même.

Ainsi, on remarque que le banquier entant que professionnel est tenu de conseiller ses clients. Ses conseils se rapprochent de celui auquel est tenu le médecin, qui doit, par exemple, avertir son patient des risques que comporte telle ou telle opération. C’est le cas des opérations bancaires qui sont aussi risquées, car elles intéressent directement le patrimoine de l’opérateur. C’est pourquoi la prestation du banquier, présumé connaisseur du domaine, sera délivrée en fonction des compétences propres du client. Elle sera renforcée lorsque le client est considéré comme un profane, et elle sera diminuée lorsque le client est initié aux produits bancaires ou il s'est fait assister par un intermédiaire spécialisé. L'intensité de l'obligation variera aussi en fonction du degré d'implication du prestataire dans le projet proposé par le banquier.

Dans son aspect précontractuel, le devoir de conseil impose, au banquier, l'orientation des choix du client et l’indication de la voie la plus adéquate. Le banquier est ainsi tenu de s'impliquer personnellement dans l'analyse des besoins de son client pour lui proposer une solution pertinente, efficace et conforme à ses attentes.

 

 

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commentaires
H
Salam <br />  <br /> On en parle souvent de ce fameux "devoir de conseil", sans trop savoir ce qu'il recouvre ou quels sont les textes qui le fondent. <br /> Ce devoir s'exprime un petit peu différemment du "devoir de mise en garde" mais les résultats de l'un et de l'autre sont presque semblables. Aussi, c'est le caractère "profane" du consommateur face au professionnel considéré comme éclairé qui précise son fondement.<br /> Par ailleurs, il est à signaler que pour qu'un contrat souscrit entre deux parties soit équilibré, il faut que le niveau d'information des deux soit relativement égal.
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