Pré et Post-Manufacturing, concept, typologie et évaluation éco.

Résumé de l’article du Pr. Dornier, Philippe-Pierre intitulé:

"Pré et Post-Manufacturing, concept, typologie et évaluation économique"

(Article paru dans la Revue Française de Gestion Industrielle, en Juin 1998, Vol. 17, Issue 1, p. 7‑29)

Avant d’entamer le vif du sujet, l’auteur a indiqué, dans son introduction, un ensemble de facteurs qui ont favorisé la naissance de ce concept. Essentiellement, il précise que la conjoncture crée, de plus en plus, des contraintes grandissantes nécessitant la réduction des coûts logistiques et notamment celui du Stockage. Aussi, la recherche de la valeur ajoutée hors des usines au lieu de la laisser campée au sein de ces derniers ainsi que l’objectif d’adaptation physique du produit aux besoins du client, sont parmi les facteurs qui ont poussé les logisticiens à inventer de nouveaux modèles logistiques. L’un de ces modèles et celui du P-Manufacturing (pour désigner pré & post-manfacturing). Ce dernier s’est développé en amont des usines sous l’appellation pré-manufacturing ou en aval sous la nomination post-manufacturing.

Illustré par des exemples concrets, l’article traite en trois parties le concept et présente, comme le précise l’auteur, une analyse du P-Manfacturing, de manière à apporter aux dirigeants industriels et logistiques un référentiel sur les différentes approches de ce concept.

I- Partie 1: Le P-Manufacturing : définition et exemples

Cette partie est consacrée, par l’auteur, à la présentation, à travers des exemples, du concept P-Manufacturing et ses différentes formes. Ainsi, le P-Manufacturing a été définit, comme étant une activité de production réalisée en dehors des sites principaux, et ce, quel que soit le produit concerné et au cours de laquelle une valeur ajoutée au sens d’utilité ou attendue par le client, est apportée au produit. Dans ce cadre, une partie des opérations et de la valeur ajoutée est réalisée en amont (pré-manufacturing) ou en aval (post manufacturing) du site principal ou final.

Le recours au concept P-Manufacturing oblige le décideur à identifier, en premier lieu, la situation. L’article présente trois types de situations élémentaires possibles :

1- La première situation est la plus fréquente et concerne la différentiation des produits. Elle est illustrée à travers quatre exemples touchant l’informatique, le verre optique, l’assemblage moto et automobile et enfin les opérations commerciales et de distribution des produits de grandes consommations. Cette situation concerne la recherche d’une différenciation au plus tard du produit. Elle peut toucher soit :

- le produit proprement dit. C’est le cas des constructeurs du matériel informatique Compaq et Epson qui sous-traitent, avant la livraison, à des prestataires logistiques l’adaptation de leurs produits aux besoins des clients. Les cas de l’optique corrective, de l’assemblage des motos en France et des véhicules Renault présentent une autre illustration de ce cas de figure.

- l’offre commerciale y afférente. Ce cas est illustré, par l’auteur, à travers l’activité commerciale et promotionnelle des produits de grande consommation. Il s’agit d’opérations d'ajout d'options (ajout de x% de produit gratuit en plus dans un flacon), d'assemblage plus ou moins élaboré (3 produits pour le prix de 2), de finition du produit ou d'emballage primaire du produit nu. D'autres opérations de P-Manufacturing portent sur du repacking (changement d'emballage) ou du copacking de produit (emballage de plusieurs produits ensembles).

2- La seconde se réfère au traitement des flux de retour. Sont concernés par cette situation les industries qui autorisent soit la réparation et la rénovation des produits ou des opérations de décomposition des produits pour récupération ou recyclage. Le cas est illustré par la pneumatique des poids lourds qui peuvent être rechapés si leur état le permet. Ainsi, une évaluation technico-économique est nécessaire pour effectuer le triage des pneus à rechaper et désigner le lieu de réalisation de l’opération.

3- La troisième situation concerne la simplification du processus de fabrication et la valorisation d’une rupture de charge. Le cas est illustré par le montage chez un sous-traitant Renault et sous sa responsabilité du système lève vitre et panneaux des portes. Il s’agit d’une simplification du processus de fabrication par la recherche d’une standardisation de modules en amont des usines.

II- Partie 2: Place du P-Manufacturing dans les approches industrielles

A la seconde partie, l’auteur a mis le point sur la place du P-Manufactring dans les approches industrielles. Trois volets on été traité dans cette partie, à savoir ; Focalisation- Standardisation-Différenciation retardée, Différenciation retardée et le P-Manufacturing et enfin Typologie des activités du P-Manufacturing.

1- Focalisation-Standardisation-Différenciation retardée: L’auteur précise que la portée du P-Manufacturing n’est définie qu’à partir de ces trois concepts classiques de la gestion industrielle. Il s’agit de notions à placer dans la recherche de la flexibilité et de la productivité pour répondre à la diversité et optimiser les ressources. L’uniformisation des composantes des nomenclatures et la segmentation des phases du processus peuvent aider à atteinte l’objectif recherché. En effet, une fois l’uniformité relative est atteinte elle en découle l’effet d’expérience et les économies d’échelle.

Ainsi, on se demande si on doit veiller à la focalisation des activités de production autour de préoccupations homogènes dominantes en regroupant des activités de même nature et à la standardisation des composants. La standardisation du produit est en liaison étroite avec ses composants. En effet, un produit fini est le résultat d’une multitude de composants dont les centraux parmi-eux possèdent une certaine poly-fonctionnalité. A partir de cette caractéristique se construit la nomenclature inverse qui montre l’ensemble des produits susceptibles d’être obtenus à partir d’un même composant central. C’est ainsi que la première étape d’un processus industriel est la réduction de la diversité sur les composants par l’approvisionnement de modules, même différents, mais qui présentent la même similitude de montage. Il s’agit d’une étape de standardisation avancée qui permet d’atteindre rapidement le stade d’uniformisation du processus. Ainsi, la Standardisation avancée se déroule en amont et explique le recours partiel à un pré-Manufacturing tandis que la transformation d’un composant central développe le principe de différenciation retardée qui peut générer des activités de post-Manufacturing. Le schéma 4 illustre la Standardisation avancée et la différenciation retardée et représente l'évolution de la différenciation en fonction de la valeur ajoutée sur les produits. Il en ressort que le Pré-Manufacturing permet d'atteindre un niveau de différenciation équivalent avec une valeur ajoutée apportée directement par l'entreprise moindre. De même en aval, un niveau de différenciation élevé peut être atteint à partir de niveau de valeur ajoutée plus important grâce au Post-Manufacturing.

2-Différenciation retardée et P-Manufacturing :

La différenciation retardée, appelée aussi postponement, est un concept qui peut être défini comme étant un processus au cours duquel un ensemble de produits chemine le long d’une chaîne de fabrication qui leur reste commune aussi longtemps que possible. Il permet de trouver une compatibilité significative entre la flexibilité et la productivité. Lorsqu’on agit dès la conception du produit, pour permettre sa différenciation aussi tard que possible dans la chaine logistique, présente l’avantage de prendre en compte le besoin de différenciation du produit et celui de produire en amont de la différenciation des séries longues de produits indifférenciés.

Le concept peut être introduit dans plusieurs domaines tels que la distribution, la production ou le domaine perceptuel. Toutefois, il doit y avoir une relocalisation d’opérations de transformation du produit dans les sites de distribution lorsqu’une différenciation au niveau de la distribution est mise en œuvre. Cette action est un cas de post-Manufacturing qui présente deux avantages en terme logistique, à savoir; c’est un facteur d’économie d’échelle en amont et apporte une plus grande stabilité des flux en amont.

3-Typologie des activités de P-Manufacturing :

Les exemples cités précédemment montrent qu’il existe des natures de P-Manufacturing très variés. Toutefois, les prestataires, dans un souci d’optimisation de leurs infrastructures tendent à spécialiser leurs unités. Les formes différentes des interventions sont identifiées à travers les critères relatifs à l’intensité de la différenciation apportée au produit et la complexité du processus à mettre en œuvre. Cinq formes P-Manufacturing sont à retenir; à savoir :

- Emballage, étiquetage, codage : C’est le modèle qui demande généralement des moyens limités. Le produit générique n’est pas modifié ;

- Le complément/échange : Ces opérations ne nécessitent pas en général de démontage ou de montage. Elles concernent donc une partie limitée du produit ;

- La transformation : Le produit est modifié ou complété. Le recours au montage et démontage demande de véritables postes de travail ;

- Les contrôles–diagnostic : Visent à tester le produit avant expédition au client. Nécessite du matériel sophistiqué et une mise en œuvre complexe ;

- La fabrication-réparation : Le produit subit un véritable processus de fabrication. De véritables ateliers, souvent de nature pré-Manufacturing sont cependant nécessaires avec une gestion de production.

III- Partie 3: Méthode d’évaluation économique

La troisième est dernière partie, est consacrée par l’auteur à la méthodologie d’évaluation économique du recours, pour des raisons de faisabilité technique ou de capacité, au P-Manufacturing. Il existe des modèles de calcul du niveau de différentiation optimale de produits. Mais cette évaluation présentée par l’auteur se limite à un modèle simple et complémentaire qui permet de justifier le passage par une organisation en évaluant les seuils quantitatifs des ventes annuelles. Le modèle touche uniquement le post-Manufacturing et présente deux cas de figure :

1-Le passage total en post-Manufacturing :

Dans ce cas le produit fabriqué est semi œuvré, une fois différencié donne p produits finis qui seront traités en P-Manufacturing en usine ou dans les n centres de distribution. Le volume des ventes de ces références V sera évalué. Pour la formulation des hypothèses il a été retenu ce qui suit:

Investissements = 0 (l’opération ne justifie pas de nouveaux investissements). Tous les stocks sont décomposables en stock outil (SCO) pour le central et SO pour les centres de distribution) et en stock de sécurité (SCS pour le central et SS pour les centres de distribution). Le stock outil central en semi-oeuvré est égal à la somme des stocks outils centraux en produits finis. Les coûts sont évalués en coût des produits (finis ou semi-oeuvrés) à l’usine à partir des volumes annuels des ventes. Le coût de revient du produit fini à l’usine est noté: Pf = Pso + δP1, avec Pso le coût de revient du semi-œuvré à l’usine et δP1 le différentiel du coût pour obtenir à partir du semi-œuvré le produit fini en usine. Le coût de revient du produit fini en post- manufacturing est noté : Ppm = Pso + δP2, avec δP2 est le différentiel du coût pour obtenir à partir du semi-œuvré le produit fini en centre de distribution. Le coût financier du stock valorisé avec un taux annuel de l’argent, noté ד . Les coûts administratifs et coûts de surface confondus et entrepôt central et centre de distribution confondus eux aussi. le coût d’obsolescence. Les produits ont des durées de vie limitées. On suppose que l’amortissement du stock résiduel, équivalent dans une situation médiane à un stock moyen (1/2 x stock outil + stock sécurité) est proportionnel à la durée de vie D, en année, du produit.

Ainsi, le volume V à partir duquel le passage total en Post-manufaturing est intéressant est donné par la résolution suivante:

2-Le passage partiel en post-Manufacturing :

Pour le 2ème cas, c'est-à-dire Le passage partiel en post-Manufacturing, La même approche peut être conduite dans le cas où il est envisagé non pas de transférer la totalité des références attachées à un semi-oeuvré en post-manufacturing mais seulement certaines d’entre elle. La question est de savoir à partir de quel volume de vente, une référence commerciale issue d’un même semi-oeuvré est transformable en P-Manufacturing. Prenons une référence y, dont le volume de vente annuelle est Vj. Ainsi, le volume Vj à partir duquel le passage partiel en Post-manufaturing est intéressant est donné par la résolution suivante:

En conclusion ; certes le périmètre et la nature des opérations réalisées en P-Manufacturing seront amenés à évoluer. Mais dors et déjà le P-Manufacturing conduit à une meilleure intégration des flux entre approvisionnement, production, distribution et soutien après-vente. Il assure aussi une meilleure flexibilité de l'ensemble de la chaîne logistique.